Obésité, diabète, dénutrition : faisons cause commune contre les maladies nutritionnelles !

Tribune

Alors que la Semaine de la dénutrition se termine et que le Parlement débat des choix budgétaires de la Sécurité sociale, les dirigeants de plusieurs associations de soignants et de personnes atteintes de maladies nutritionnelles demandent, dans une tribune collective au « Monde », l’adoption de trois mesures afin de mieux lutter contre l’obésité, le diabète et la dénutrition.

De la fourche à l’assiette, nous ne pouvons que constater la place centrale de l’alimentation dans notre société au regard de ses enjeux culturels, économiques et sociaux.

Plusieurs phénomènes, comme le vieillissement de notre population ou la surconsommation de produits de qualité médiocre, tendent à donner un rôle encore plus crucial à l’alimentation et à l’activité physique pour les années à venir. Pour nous, soignants et représentants de personnes atteintes de maladies nutritionnelles, l’alimentation et l’activité physique ont aussi une valeur fondamentale : ce sont les premiers piliers de la prévention et du soin ! 

Les maladies nutritionnelles en France 

À l’heure où notre pays doit prendre le virage de la prévention pour soutenir un système de santé en difficulté et encore trop centré sur le curatif, nous souhaitons réaffirmer l’importance de la consultation diététique réalisée par un.e diététicie.ne et de la prise en charge par un.e enseignant.e en activité physique adaptée accessible au plus grand nombre.

Les principales maladies nutritionnelles que sont l’obésité, le diabète et la dénutrition sont fréquentes en France… Selon Santé Publique France, le diabète touchait en effet 4,2 millions de personnes en 2021, quand l’année précédente le Ministère de la Santé avançait le chiffre de 8,5 millions de Français en situation d’obésité. Troisième plus importante maladie nutritionnelle, la dénutrition concernerait quant à elle entre 2 et 3 millions de personnes, de l’enfant à la personne âgée.

Ces maladies ont pour particularité de pouvoir se cumuler chez une même personne. Concrètement, nous pouvons être en situation d’obésité, avec un excédent de graisse et dénutri, faute d’une masse musculaire suffisante. Aussi, les personnes souffrant d’un diabète de type 2, le plus souvent associé à une surcharge pondérale, courent un risque important de perdre de la masse musculaire et d’être dénutri lorsque les complications du diabète entraînent une sédentarité et une perte d’appétit. Ainsi, obésité, diabète et dénutrition ne sont pas des maladies distinctes, mais bien à considérer comme des variations, dans le temps et selon les situations individuelles, de maladies liées à la nutrition.

Alimentation et activité physique sont les deux faces d’une même médaille

Les Jeux Olympiques et la Grande Cause Nationale 2024 ont permis de promouvoir auprès du plus grand nombre – et donc de toutes les personnes fragiles et malades – les bienfaits de l’activité physique, adaptée ou non. Là encore, nous devons agir résolument ! Afin d’être réellement accessible à tous, la prescription d’activité physique adaptée (APA) devra être remboursée par l’Assurance maladie.

Le Gouvernement a créé le programme des Maisons Sport-Santé (MSS) en 2019. Ce dispositif d’accompagnement s’adresse aussi bien aux personnes en bonne santé qui ne pratiquent pas (ou plus) de sport qu’aux personnes souffrant de maladies chroniques nécessitant une activité physique adaptée sécurisée par des professionnels formés. Celle-ci peut être prescrite par un médecin depuis 2016[1]et a fait l’objet de recommandations de bonnes pratiques par la Haute Autorité de Santé en 2022[2].  Si l’on considère que l’APA peut être prescrite pour des raisons médicales, et qu’elle doit être encadrée par un professionnel formé spécifiquement, il faut maintenant qu’elle soit remboursée !

Au-delà des efforts des pouvoirs publics et des professionnels pour sensibiliser la population ciblée, nous pensons qu’il faut aller plus loin en créant une consultation diététique réalisée par un-e diététicien-ne prise en charge financièrement par la solidarité nationale. Les personnes malades et/ou en situation de vulnérabilité doivent pouvoir être accompagnées par des professionnels compétents en nutrition/diététique pour avoir accès à un soin nutritionnel personnalisé et adapté.

Enfin, les personnes atteintes de maladies nutritionnelles sont parfois hospitalisées au cours de leur parcours de soins et dans les enquêtes auprès des usagers, l’alimentation est souvent le soin le moins apprécié à l’hôpital ! Faute de moyens, y compris dans l’achat de denrées de qualité suffisante, la restauration hospitalière peine à proposer des repas satisfaisants. Nous pourrions également donner plus de moyens aux équipes des établissements sanitaires en consacrant un tiers du forfait journalier de ces structures pour l’alimentation.

Un horizon commun au bénéfice de la santé des Français

Au regard des déterminants sociaux en matière d’accès à une alimentation de qualité et à l’activité physique adaptée, ces deux mesures sont pour nous un point d’honneur et un enjeu de justice sociale.

Nous savons bien que ces mesures coûteront de l’argent à l’Etat. Mais elles n’en demeurent pas moins des fondations solides pour développer la prévention dans notre pays. Nous souhaitons ainsi redoubler d’ambition pour ce combat essentiel à la bonne santé des Françaises et des Français.

Faisons donc cause commune et retrouvons-nous pour porter, ensemble, ces mesures et ce travail de conviction !

Cliquez ici pour retrouver l’article sur le site de Le Monde

Signataires :

Agathe Raynaud-Simon, Présidente du Collectif de lutte contre la dénutrition

Jacky Vollet, Président de la Fédération Française des diabétiques

Anne-Sophie Joly, Présidente du Collectif National des Associations d’Obèses

Vanessa Cottet, Présidente de la Fédération Française de Nutrition

Francisca Joly, Présidente de la Société Francophone de Nutrition Clinique et Métabolisme

François Pattou, Président de la Société Française et Francophone de Chirurgie de l’Obésité et des Maladies Métaboliques

Patrick Pessaux, Président de l’Association Française de Chirurgie et du Collectif EcoResponsabilité En Santé (CERES)

Eric Renard, Président de la Société Francophone du Diabète

Ghislain Grodard-Humbert, Président de l’Association Française des Diététiciens Nutritionnistes

Karine Clément, Présidente de l’Association Française d’Etude et de Recherche sur l’Obésité


[1] Article L1172-1 du CSP, et article D 1172-1 du CSP introduit par le décret du 30 décembre 2016

[2] https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2022-08/synthese_prescription_apa_vf.pdf