L’alimentation rythme nos repères

Sophie Fusari

Ergothérapeute en gériatrie à l’hôpital Saint-Camille et dans le service de soins de suite et de réadaptation du CH Les Murets (94), formatrice au sein de l’Association nationale française des ergothérapeutes (ANFE).

Le Collectif de lutte contre la dénutrition : Comment l’ergothérapie permet-elle de lutter contre la dénutrition ?

Sophie Fusari : En luttant contre la perte d’autonomie, on prévient aussi le risque de dénutrition, et par l’intermédiaire du goût, on réussit à mobiliser l’ensemble des capacités motrices et sensitives des patients. C’est un exemple typique de cercle vertueux. L’objectif est de réapprendre au malade à manger et à cuisiner en éveillant ses sens. Cela inclut tout un travail autour du choix des ingrédients et de la préparation des repas afin de lui redonner l’envie de s’alimenter et de retrouver son autonomie. J’organise des ateliers pâtisserie avec des patients atteints de maladies neurodégénératives : nous faisons les courses puis nous préparons ensemble les gâteaux. Je pose des questions simples qui visent à réveiller leurs souvenirs gustatifs pour les aider à reconstruire leurs repères et à retrouver la capacité à faire des choix (« Que détestez-vous, qu’adorez-vous manger ? »). J’organise également des séances de stimulations cognitives ou de réadaptation pour apprendre à faire autrement tout en préservant la notion de plaisir et de partage. Ce qui est clair, c’est que l’ergothérapie fonctionne mais elle elle n’est pas assez reconnue du fait de sa non-prise en charge à l’extérieur des institutions. Nous tentons de pallier ce manque en organisant des formations sur les troubles de la déglutition, l’installation du repas ou encore le maintien de l’autonomie dans les activités de la vie quotidienne chez la personne âgée, mais il est primordial que nous soyons davantage insérés dans la prise en charge de la dénutrition.